Commission européenne : 5 choses à retenir sur la nouvelle équipe d’Ursula von der Leyen

Alors que la poussière retombe après des semaines de querelles, voici ce qu'il faut savoir.

Commission européenne : 5 choses à retenir sur la nouvelle équipe d’Ursula von der Leyen

Un avertissement à Vladimir Poutine. Des femmes à des postes importants. Des prières exaucées pour les Etats d’Europe du Sud, qui auront plus de poids qu’auparavant sur la politique économique de l’Union.

Voici quelques-unes des caractéristiques principales de la nouvelle équipe de commissaires européens d’Ursula von der Leyen, dévoilée mardi après des mois d’attente, de controverses et de changements de dernière minute.

L’Allemande est parvenue à présenter une équipe presque paritaire, alors que les pays de l’UE n’avaient initialement envoyé qu’une poignée de femmes pour les 26 postes à pourvoir. Son combat de dernière minute a suscité une certaine controverse, notamment parce que le choix de la Slovénie est toujours bloqué par une procédure parlementaire nationale. Mais à la fin, 40% des postes ont été attribués à des femmes.

Alors que le Parlement européen auditionnera en octobre les commissaires, un par Etat membre à l’exception de l’Allemagne (car von der Leyen est sa commissaire), POLITICO zoome sur les cinq points clés à retenir de cette nouvelle équipe.

1. Une mauvaise nouvelle pour Vladimir Poutine

Si Moscou avait besoin d’un rappel que Bruxelles soutient toujours Kiev, il l’a eu mardi.

Ursula von der Leyen est une fervente défenseure de l’aide à l’Ukraine dans la guerre contre la Russie, et cela se reflète dans sa composition d’équipe pour son second mandat. Deux candidats originaires des pays baltes obtiennent des portefeuilles clés dans la gestion des relations avec la Russie. Outre l’Estonienne Kaja Kallas, haute représentante de l’Union aux affaires étrangères, le Lituanien Andrius Kubilius sera chargé du nouveau portefeuille de la Défense. Kubilius rendra compte à la commissaire finlandaise, Henna Virkkunen, vice-présidente exécutive pour la Souveraineté technologique, la Sécurité et la Démocratie. Helsinki est l’un des critiques les plus sévères de la Russie en Europe.

Les cinq prochaines années seront déterminantes pour préparer l’élargissement de l’Union à l’Ukraine, la Moldavie et les Balkans. C’est pourquoi le portefeuille de l’Elargissement est divisé en deux, de sorte qu’un commissaire puisse se concentrer principalement sur l’entrée de nouveaux Etats dans l’UE et que l’autre s’occupe des intérêts européens en Méditerranée, à savoir le développement économique et le contrôle des migrations. La commissaire slovène, Marta Kos, sera chargée de l’Elargissement.

2. Von der Leyen garde le contrôle de l’argent (et… de tout le reste)

C’était l’un des secrets les moins bien gardés de Bruxelles : le portefeuille clé du Budget revient au Polonais Piotr Serafin. L’Union européenne se prépare à une bataille épique sur son plan de dépenses pour les sept prochaines années, dans lequel chaque pays souhaite y voir ses propres priorités.

Le Premier ministre polonais Donald Tusk a eu un bon pouvoir de négociation dans la distribution des portefeuilles, car son pays est le plus grand mené par un membre du Parti populaire européen (PPE, la propre famille politique de von der Leyen) et il a aidé l’Allemande à décrocher un second mandat. Serafin rendra compte directement à von der Leyen et non à l’un des vice-présidents exécutifs, ce qui lui permettra d’exercer un contrôle direct sur le budget — au cas où l’on aurait encore des doutes sur qui dirige vraiment la Commission.

3. Von der Leyen s’autocongratuler sur la parité même si elle n’est pas atteinte

La lutte menée pendant un mois par Ursula von der Leyen pour obtenir une Commission européenne paritaire n’a pas abouti à un nombre égal d’hommes et de femmes dans son équipe, malgré les pressions qu’elle a exercées sur les Etats pour qu’ils proposent chacun deux candidats, un de chaque sexe. Certains ont même été invités à changer leur choix après la date limite du mois d’août. L’exécutif bruxellois compte aujourd’hui 11 femmes (von der Leyen incluse).

Pour tourner l’histoire en sa faveur, l’Allemande a cherché un équilibre différent dans les postes les plus élevés : les vice-présidents exécutifs. Cette équipe est composée de quatre femmes et de deux hommes, ce qui a permis à von der Leyen de s’autocongratuler. Mais ce n’est pas encore fini. Le Parlement européen doit encore auditionner et approuver les futurs commissaires.

4. Le Sud obtient des portefeuilles économiques clés

Les pays du Sud ont bien tiré leur épingle du jeu dans la sélection d’Ursula von der Leyen, en obtenant un certain nombre de maroquins économiques très demandés. L’Italie sera chargée du vaste portefeuille du Fonds de cohésion de l’UE, le Portugal sera responsable des Services financiers (un poste clé dans le cadre de la réforme des marchés de capitaux de l’UE), tandis que l’Espagnole Teresa Ribera supervisera les puissants outils d’application de la législation européenne sur la concurrence.

Les pays du Sud ont bien tiré leur épingle du jeu dans la sélection d’Ursula von der Leyen, en obtenant plusieurs portefeuilles économiques très demandés. | Pierre-Philippe Marcou/AFP via Getty Images

La France, qui fait souvent le pont entre les pays du Sud et ceux du Nord, sera chargée de la Stratégie industrielle et de la “Prospérité”. Cela implique de mettre en œuvre des mesures poussées par von der Leyen pour rendre l’Union européenne plus compétitive sur la scène internationale en augmentant les investissements et en adoptant une réglementation plus intelligente.

La nouvelle structure confère aux Etats du Sud un rôle important dans l’effort de compétitivité de l’Union européenne. Ceci étant, les préoccupations des pays dits frugaux n’ont pas été totalement écartées, étant donné le portefeuille important confié à Piotr Serafin, considéré comme sympathique aux pays du Nord.

5. Von der Leyen garde Meloni près d’elle

Le candidat italien Raffaele Fitto obtient une vice-présidence exécutive et sera responsable de la Cohésion et des Réformes. Et ce, malgré les protestations des sociaux-démocrates, des libéraux de Renew, des Verts et de La Gauche, qui se sont insurgés contre l’idée de confier un poste aussi important à un membre des Frères d’Italie, un parti d’extrême droite.

La présidente du groupe Renew, Valérie Hayer, a qualifié d’“inacceptable” la nomination de Raffaele Fitto à un poste de vice-président exécutif, tandis que les sociaux-démocrates sont allés jusqu’à menacer de retirer leur soutien à la Commission de von der Leyen. Reste à voir si ces menaces seront suivies d’effets.

La nomination de Fitto est une victoire pour Giorgia Meloni, qui n’a pas été pénalisée par son choix de ne pas soutenir la réélection de von der Leyen. Ancien ministre de l’Europe dans le gouvernement de Meloni, Raffaele Fitto est considéré comme une voix modérée dans le camp de la Première ministre. La Cohésion et les Réformes sont des dossiers importants pour l’Italie, même si les portefeuilles économiques les plus importants ont été attribués à la France et à l’Espagne.

Cet article a d’abord été publié par POLITICO en anglais et a été édité en français par Jean-Christophe Catalon.